Homo ange
Alejandro Silva
Ejemplo de texto, del 21 agosto. Les habitants des hauts plateaux craignent que le projet ne les prive de leurs ressources en eau. | Chile/Cecile Bouscayrol
- “Homo ange”
- 2015
- Xylographie
- 76x110 cm
- ©
"L'oeuvre est inspirée de Narcisse, mythe grec qui relate l'histoire d'un jeune homme doué d'une grande beauté dont les jeunes-filles sont amoureuses mais qu'il repousse. Devant sa vanité, Némésis, déesse de la vengeance, le fait tomber amoureux de son propre reflet alors qu'il le regarde se réfléchissant à la surface de l'eau d'une fontaine. C'est ainsi que Narcisse est absorbé par le reflet de son image, il finit par se jeter dans les eaux et, à l'endroit où il s'est noyé, pousse une belle fleur qui porte son nom. De cette morale, l'oeuvre Homo ange, préserve l'idée classique de la beauté ambiguë, ingénue et pubère ; de l'auto-érotisme et sa relation avec l'homosexualité, comprise à partir l'amour d'un homme par un autre, se voyant reflété le premier dans le second et réciproquement.
De plus, la beauté proposée dans cette gravure est reliée à la perfection de l'Ange. L'image joue avec une double conception humaine céleste, puisque les anges narcissiques tiennent leur coeur ensanglanté qu'ils partagent au centre de l'image. Une double lecture de l'image est donc possible incluant la notion de beauté céleste enviée par cet humain qui célèbre le corps, envie qui se reflète dans le coeur."
Les symboles bibliques ont inspiré plusieurs des gravures d'Alejandro Silva. Parmi eux, figure la créature céleste de l'ange. Les anges dans la Bible n'ont pas tous la même origine et ont également des natures différentes. Leur représentation est, en conséquence, variée et classifiée selon qu'ils ont ou non péché. L'iconographie les distingue en fonction de leurs apparence, par exemple : les anges ont une paire d'ailes, les chérubins en ont deux paires, tandis que les séraphins en portent trois paires (une couvre leur visage, une couvre leurs pieds, la troisième leur permet de voler).
Il n'existe pas d'homo ange : les anges ne sont pas des hommes. Qu'importe ! Alejandro Silva l'invente, conférant ainsi à la créature céleste une origine humaine. Faut-il y voir une représentation des anges qui ont péché ? S'agit-il de Satan ? "Meurtrier dès le commencement" car "il n'a pas persévéré dans la vérité", il profère le mensonge. Le répertoire des anges donne la possibilité aux auteurs anciens, et donc à ceux d'aujourd'hui, de transposer la réalité via une iconographie codifiée et dont l'accès est donné par la connaissance de leur signification précise.
Les anges ont de multiples capacités, ils nous visitent, nous conduisent. Ils ont un langage propre : ils chantent. Ils louent Dieu et l'adorent. Paul (Première épître aux Corinthiens, chapitre 13) nous dit : "Si je parle dans les langues des hommes et des anges, mais que je n'aie pas l'amour, je suis comme un airain qui résonne ou comme une cymbale retentissante". L'artiste en intitulant son ange Homo ange crée une nouvelle catégorie d'ange, qui n'est pas sans rappeler la dénomination d'homo sapiens.
Alejandro Silva donne une représentation symétrique de son Homo ange et lui confère ainsi une présence forte et énigmatique : est-ce son reflet ? La référence pourrait se rapporter au propos sur l'art : est-il imitation de la nature ? Ou bien, est-il le reflet de lui-même (relié à la recherche de vérité de l'artiste) ? Cet ange aux joues pommées incrustées de fleur a le visage des anges sculpté dans la pierre, ses cheveux sont stylisés en mèches ondulées comme sur les tympans des églises romanes du haut moyen-âge (l'ange au sourire de la cathédrale de Reims étant le plus connu).
L'Homo ange tient entre ses mains le coeur de Jésus-Christ représenté enflammé et brillant d'une lumière divine, centré entre les deux demi corps. C'est la dévotion au Sacré-coeur qui serait donc illustrée. Symbole de l'amour divin, le Sacré-coeur renforce l'idée première d'une évocation magistrale de l'amour.
En couleur, cette gravure (de grande taille) rappelle les images de dévotion de petit format produites à l'intention des fidèles. L'usage de ces images dévotes, qui présentaient au dos une prière ou une litanie, ont une valeur protectrice et le fidèles souvent l'épinglait à ses vêtements ou bien la gardait dans sa poche. La protection allait jusqu'aux biens matériels, ainsi le Sacré-Cœur bénit les maisons où l’image de son cœur est exposée et honorée.
Cécile Bouscayrol