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Le contre-miroir de l'Archange

Guadalupe Elizalde

Dotée d'un style unique, la sourde et forte euphonie de la poétesse mexicaine Guadalupe Elizalde renferme un monde rempli d'images et, peut-être, une douloureuse expérience de vie . Ce sera la recherche de l'amour, en définitive, la seule issue vers le salut, affirme t-elle dans son écriture harmonique. Brisures du Temps et Assassin à la maison sont ses deux plus récentes productions.

La version argentine de Brisures du temps, publiée par les éditions tsé-tsé dix ans après sa première publication, au Mexique, introduit des modifications rythmiques réussies et une bonne quantité de poèmes qui donnent corps au volume. Sur les trente huit textes originaux, elle en préserve trente cinq et en ajoute quinze nouveaux dans un ordre plus logique que celui de l'édition mexicaine.

Le scénario sur lequel Guadalupe Elizalde base la poésie est tout à fait unique et répond à son propre style. Son expression apparemment fermée maintient un rythme clairement identifiable -à la fois lent et intense- et une harmonie soutenue par les équilibres presque sculpturaux pour ébaucher le texte sur la page. Cette forme génère un fort intérêt du lecteur pour pénétrer dans le texte et démêler sa manière de raconter. Parce qu'Elizalde, en définitive, parle de passion humaine.

Toutefois, en réexaminant ce recueil, de l'acte d'amour, avec son intensité réelle et sa vibration résulte -selon la poétesse- un exercice inutile, une quête insensée puisqu'il est consommé dans son immédiate réalisation : « toujours il en fut ainsi des fleurs / au vase / positions d'agonie" (Dans Vaine leçon) Pour elle, il existe comme une permanence, bien que cette certitude naisse de l'absence de cet amour -ou de sa recherche insolite, cette incongruité, la source de son sens et de sa réalisation : «l'esprit évoque le thalamus futur/ poussière de poussière/ genèse de genèse/ il délimite l'air d'une peau qui mue/ comme le linceul d'une vipère/ pour réitérer/ un identique homicide »(dans Linceul)

Elizalde pratique une forme de double métaphore déjà remarquée par la poésie la plus moderne, elle joue avec les images les unes entre les autres, pour la fortifier ensuite par un revirement de situation. Parfois, cet exercice aboutit à une solution rhétorique et, d'autres fois, il est utilisé pour se cacher comme un porte manteau sous les jupes accrochées dans un placard: "Les références aux placards comme emplacements possibles, sont littérales, c'est dommage qu'ils soient tombés en désuétude"/ dans Confession de foi, note explicative dans Assassin à la maison. La réalité est à l'extérieur insupportable, quand elle n'est pas négligeable: la petite fille qu'elle fut, la petite blessure dus aux évènements du monde moderne, la tendresse chaleureuse qui semble se cacher derrière une image d'une force extraordinaire, répondent à la rupture substantielle, auquel l'original labyrinthe du temps où l'amour, comme circonstance créative et fondamental, la convertirait -à s'y refuser- en une orpheline de guerre. Ennemi à la maison est un exemple, un témoignage brutal de cette situation.

Le thème de la violence dans sa forme la plus courante et, plus encore, la violence contre les enfants, marque ces pages de douleur. Est-il possible, alors, est-il permis de laisser place aux secrets? Guadalupe, dans les yeux de laquelle paissent et s'abreuvent les loups de la mémoire -dans son sens le plus ésotérique- clame «se souvenir de tout/ pour m'oublier" (dans le Cantique des heurtoirs), affaire qui la maintient encore comme "Sirgo sur le mur de cette cellule" parce que" Qui a dépassé la mesure dans cette prison/ connait la mémoire de ses sous-sols »(dans Tableau d'enfant). Et voici que son beau langage et le flux rythmique du vers nous pénètre, non seulement nous lecteurs les plus audacieux- depuis un monde souterrain et fertile, mais aussi solaire, vers un paysage d'un autre âge à l'autre bout de la planète Bien que la version finale du verset, comme le prétend le poète Antonio Cisneros, appartient à son auteur: « humer la terre promise/ et dans l'antichambre assister au contre-miroir de l'Archange" (dans Choses comme ça).

Mais au-delà de cette texture concentrée, ou du schéma général ou scénario sur lequel Guadalupe Elizalde construit ses versets, il y a des pièces d'une valeur remarquable et capables de se justifier en elles-mêmes. Je cite, parmi d'autres, Des cerfs et des chasseurs, Enfant des olives et Des tigres et des panthères.

La première résulte d'une réflexion approfondie sur les rôles que toute activité humaine nous imposent, soit comme victime ou agresseur, soit comme acheteur ou vendeur de toute offre unique. Dans les deux cas «Le cerf ne distingue pas entre les branches ses ramures de pacotille/ sa peau ne mue pas, elle n'est pas uniforme (...) Il confie, accélère les montres, accompagne son espèce, les "chasseurs" sont ataviques, primitifs (...) ils divisent le monde en deux Ils divisent le monde en deux (...) Ils aiment regarder comme pourrissent les rêves et les mandarines ". Enfant des olives est un petit sujet qui rit et se moque de l'incapacité des autres: « Regard obsidien à contre-jour / comme phare en cachette, littéralement réfractaire »; mais qui, à contre-jour, lui permettra d'opter pour un changement, pour un meilleur choix dans son parcours. C'est un texte auquel on est reconnaissant. Des tigres et des panthères, extraits d'Anthologie et Bestiaire, devient un exemple de sa meilleure poésie: «Si survivre au tigre vous parait héroïque/ apprivoisez la cage ..."

Biographie résumée

La poétesse mexicaine Maria Guadalupe Lopez-Elizalde et Gallegos est née en 1957. Elle réside dans le quartier fédéral et est l'une des plus grands poétesse du discours littéraire de son pays. Elle a publié Synesthesie (1989), Les lambeaux du temps (1995 et 2005), Fantoche, Xochiquetzal, Anthologie et Bestiaire (Costa Rica, 2004) et Assassin à la maison (2005) En 1988, il reçoit le Prix National de Journalisme, la médaille de la liberté d'expression, et en 1991 elle a obtenu le prestigieux Prix Sor Juana Inès de la Cruz.En prose, elle a publié Mario Moreno et Cantinflas brisent le silence, seule biographie autorisée de l'acteur aztèque, L'histoire de la carpe et le théâtre au Mexique. Elle collabore à diverses revues et des médias de presse de son pays, d'Espagne et d'Amérique centrale.

Postedby Juan Cameron

Marqueurs

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